Circulation alternée : quelle est son efficacité réelle ?
Publié le 22 mars 2015 à 19h10 | Fabrice SPATH | 4 minutes
Quel impact la circulation alternée a-t-elle sur les concentrations en particules fines ?
Pour la troisième fois en 18 ans, Paris et sa petite couronne appliqueront le dispositif de circulation alternée pour lutter contre le phénomène de pollution atmosphérique. Dès 5h30, seuls les véhicules aux plaques impaires, les véhicules électriques et hybrides ou encore ceux assurant une mission de service public pourront librement circuler demain lundi 23 mars 2015. Mais cette mesure exceptionnelle et restrictive est-elle efficace ?
De nombreuses régions concernées par la pollution
Demain lundi 23 mars, seuls les véhicules dotés de plaques d’immatriculation impaires pourront circuler à Paris et sa petite couronne (22 communes concernées). Parmi les véhicules non concernés par la mesure de circulation alternée : les véhicules hybrides et électriques, ceux assurant une mission de service public ou encore les véhicules utilitaires de moins de 3,5 tonnes (lire notre dossier Circulation alternée : comment ça marche ?). Même si la grande moitié nord de la France, la région Rhône-Alpes et une partie de la région Centre sont concernées par ces pics de pollution depuis 6 jours, seule la capitale a décidé de mettre en place ce dispositif exceptionnel.
Fortes concentrations en particules fines PM10
Pour la troisième fois en 18 ans, Paris et sa petite couronne vont mettre en place la circulation alternée. En octobre 1997, le territoire avait dû faire face à une pollution à l’ozone. En mars 2014, la pollution était d’une autre nature : la concentration en particules fines notamment issues de la combustion des véhicules avait dépassé le seuil d’alerte. Un an plus tard, la pollution qui irrite une partie de la France depuis 6 jours est de même nature. Ces particules fines PM10 dont le diamètre est inférieur à 10 microns (soit 0,01 mm) ont été classées comme substances « cancérogènes certains » par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
Particules fines : pas que l’automobile …
Si le transport représente 40 à 80 % des émissions de particules fines en milieu urbain, il en va tout autrement en-dehors des zones à forte densité de population. En moyenne, on estime ainsi que l’automobile ne représente que 15 % des émissions. L’industrie manufacturière (30 %), le chauffage des logements et des entreprises (30 %) et l’épandage de produits phytosanitaires (20 %) sont les plus gros contributeurs. Mais les particules fines ne sont pas les seules responsables de la pollution atmosphérique. Les émissions d’oxyde d’azote (NOx) dont le transport routier est un grand contributeur sont également pointées du doigt.
15 % de PM10 en moins sur la journée
En mai 2014, l’association de surveillance de la qualité de l’air en Ile-de-France (Airparif) a publié un bilan de l’épisode de pollution et de la circulation alternée. Résultat sur la zone concernée par la circulation alternée du 17 mars 2014 : en moyenne, les concentrations de particules PM10 ont été réduites de 15 % et celles des NOx de 20 %. Une évaluation menée par l’ADEME également publiée en mai 2014 a apporté une excellente contribution au débat portant sur l’efficacité de cette mesure exceptionnelle. Selon cette évaluation :
- 3 sondés sur 4 ont maintenu leurs déplacements
- 61 % se sont orientés vers les transports doux (dont les transports en commun)
- 61 % ont estimé que leurs démarches étaient facilement reproductibles
Solution miracle ou dispositif court-termiste ?
La circulation alternée n’est qu’un pansement qu’une collectivité pose sur un mal bien plus durable. Arbitraire, elle ne cible pas les véhicules les plus polluants. La France fait partie des pays européens dont les concentrations journalières de particules fines dépassent très régulièrement le seuil fixé par la Commission européenne (lire notre article Pollution automobile : quand la France devra payer). Le parc automobile vieillissant largement diésélisé associé à la congestion des métropoles françaises devrait multiplier les pics de pollution à l’avenir. Seuls des actions pérennes en faveur des transports en commun, des transports doux, des véhicules décarbonés ou encore du télétravail permettront de changer la donne.