Voiture électrique : Berlin et Paris s’entendent sur l’Airbus des batteries
Publié le 19 décembre 2018 à 15h00 | Fabrice SPATH | 4 minutes
Très attendue, la feuille de route en faveur de la création d’une filière européenne de la batterie pour le stockage d’énergie et la mobilité électrique a été signée hier par les ministres allemand et français des Finances et de l’Économie. Objectifs : concevoir, produire et recycler sur le continent des accumulateurs moins chers, plus durables mais aussi créateurs d’emplois.
Après plusieurs mois de tergiversations, l’Europe s’accorde enfin sur un texte pour la création d’une filière batteries. Signée hier mardi 18 décembre en marge de la sixième réunion annuelle des Amis de l’Industrie - un sommet dont la mission est de rapprocher les pays européens qui ont l’ambition d’une stratégie industrielle commune -, cette déclaration d’intention vise à jeter les bases d’ « une approche stratégique » destinée à créer une filière sur le continent.
Le secteur public au secours du privé
Une filière dans laquelle le secteur privé a jusqu’alors rechigner à investir, les constructeurs préférant se concentrer sur leur cœur de métier, les équipementiers estimant les risques financiers trop importants.
Stratégique, elle devra accompagner la montée en puissance de la production de véhicules électrifiés - électriques et hybrides rechargeables - qui, chez les constructeurs, représentera une part significative des ventes d’ici 2030.« Les gouvernements allemand et français, en coopération avec la Commission européenne, vont développer une approche stratégique pour établir une cellule de production industrielle de batteries en Europe », ont indiqué le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, et le ministre allemand de l'Économie, Peter Altmaier.
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Un projet à faire valider par la Commission
Si l’Allemagne s’est engagée à débloquer une enveloppe d’un milliard d’euros dans ce projet d’ici 2022, la France n’a pas encore communiqué de montant mais devrait puiser dans le fond pour l’Industrie et l’Innovation doté d’un budget de 10 milliards d’euros.
Le premier objectif des pays signataires de cette feuille de route consiste à convaincre la Commission européenne d’accorder au projet le statut d’IPCEI (Important Project of Common European Investment) dès le premier semestre 2019, et ce afin de pouvoir subventionner rapidement les initiatives privées engagées dans la filière.
Dans leur déclaration d’intention rédigée en 8 points, les auteurs précisent que la production de batteries devra débuter au plus tôt et en appellent aux constructeurs automobiles pour garantir des volumes suffisants. Des constructeurs qui, faute d’offre européenne, ont désigné leurs propres fournisseurs de cellules, asiatiques pour la plupart.
À commencer par le groupe Volkswagen qui souhaite investir un total de 44 milliards d’euros dans l’électrification de ses modèles d’ici 2025 et qui, récemment, a complété la liste de ses fournisseurs - les sud-coréens LG Chem et Samsung SDI ainsi que le chinois CATL - avec le sud-coréen SK Innovation. Autant d’industriels qui ont tous investi dans des sites de production européens.
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Préserver l’emploi et l’environnement
Enfin, les auteurs de ce texte appellent les acteurs engagés dans la mobilité électrique à développer au travers de cette filière la batterie de quatrième génération, moins chère à produire, plus rapide à charger, à la longévité accrue et au moindre impact environnemental.
Pour ce faire, la feuille de route évoque l’ensemble de la chaîne de valeurs de la batterie, de la R&D à la production, en passant par le recyclage et la seconde vie, via le stockage d’énergie stationnaire d’énergies intermittentes (éolien et solaire).
Une ambition qui devra aussi être créatrice d’emplois, les acteurs du secteur automobile étant inquiets quant à l’électrification grandissante du parc imposée par les normes antipollution. Moins complexes à produire, les véhicules 100 % électriques ainsi pourraient détruire plusieurs dizaines de milliers d’emplois lors de la prochaine décennie, selon une estimation publiée par l’ACEA.
Une crainte entendue par les pays signataires. Dans leur déclaration, ces derniers ont rappelé que l'industrie emploie près de 32 millions de personnes en Europe, auxquels s'ajoutent 30 millions d'emplois indirects.