Du Dieselgate au Monkeygate : nouveau scandale des émissions en Allemagne
Publié le 02 février 2018 à 15h00 | Mathieu PARAIN | 3 minutes
Financées par les constructeurs allemands, deux études ont employé des jeunes adultes et des signes pour démontrer l’innocuité des gaz d’échappement du diesel
Une vingtaine de personnes ont volontairement inhalé du dioxyde d’azote à des doses variées pendant trois ans pour les besoins d’une étude scientifique financée par les constructeurs allemands. Des singes ont également été mis à profit pour prouver l’innocuité des gaz d’échappement diesel. Des révélations qui provoquent un véritable scandale en Allemagne.
Le dioxyde d’azote (NO2) est-il une substance cancérigène ? Telle est la question à laquelle ont tenté de répondre les scientifiques allemands à l’origine de l’étude controversée, dont l’existence a été révélée par le Stuttgarter Zeitung. Ce gaz, que l’on trouve notamment à la sortie des pots d’échappement des voitures diesel, est considéré par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme étant susceptible d’avoir des effets cancérigènes sur l’être humain. C’est le Groupe européen de recherche sur l’environnement et la santé dans le secteur du transport (EUGT), organisme – dissous l’année dernière – financé par Daimler, BMW et Volkswagen, ainsi que par l’équipementier R. Bosch qui a commandité la recherche.
Des volontaires pour démontrer l’innocuité du diesel
Entre 2012 et 2015, vingt-cinq jeunes adultes en bonne santé ont accepté de se prêter à des tests mis en place par l’hôpital universitaire d’Aix-la-Chapelle (Allemagne) pour connaître les effets du NO2 sur la santé des cellules humaines. Selon le journal Le Monde, ces personnes devaient être exposées une fois par semaine et pendant environ trois heures à de fortes concentrations de NO2 dans une pièce de 40 mètres carré, concentrations qui pouvaient parfois ainsi atteindre jusqu’à 2 850 microgrammes par mètre cube, trois fois la valeur limite d’exposition professionnelle, qui est de 950 microgrammes par mètre cube.
Une information que semble toutefois contestée Thomas Steg, l’ancien responsable les relations publiques de Volkswagen, qui s’est récemment entretenu dans les colonnes du quotidien allemand à grand tirage Bild. Selon ses dires, les volontaires qui ont participé à l’étude avaient été exposés à des « niveaux bien plus faibles que ceux constatés sur de nombreux lieux de travail ». Quoi qu’il en soit, les effets des gaz d’échappement sur les personnes n’ont pas pu être déterminés par l’étude.
Des tests réalisés sur des singes en 2014
Outre-Rhin, mais aussi dans le reste de l’Europe, la méthode utilisée lors de l’expérimentation, qui consiste à faire inhaler à des êtres humains un gaz soupçonné d’être toxique, a fortement ému. Barbara Hendricks, la ministre allemande de l’environnement s’est dite « écœurée ». « La confiance en l’industrie automobile est à nouveau écornée », a estimé quant à lui Christian Schmidt, le ministre allemand des transports et de l’agriculture, précisant que les groupes concernés seraient convoqués devant la commission d’enquête du Bundestag mise en place après le scandale du « Dieselgate ».
Même Daimler, qui a participé au financement de l’EUGT, s’est dit « consterné » par les tests, et a affirmé les « condamner fermement ». Le groupe, qui a par ailleurs assuré n’avoir aucun lien direct avec l’étude, va tout de même lancer une enquête interne. En 2014, 10 macaques avaient été enfermés dans une pièce pendant quatre heures et devaient respirer les gaz d’échappement d’une Volkswagen Beetle à motorisation diesel. Une expérimentation sobrement rebaptisée « Monkeygate » qui avait été menée dans un laboratoire d’Albuquerque (Nouveau-Mexique), toujours sous la direction de l’EUGT. Les tests ont mis en évidence que les animaux ayant inhalé les émanations d’un diesel supposé plus propre « présentaient plus de signes inflammatoires que ceux qui ont respiré l’ancien », a rapporté un expert au quotidien allemand Bild.